samedi 24 décembre 2011

Réjouissance de Noël

Je ne vais pas souhaiter un joyeux noël sur ce blog (parce que ça craint). Je me contenterai donc de vous dire que les jeunes Japonaises n'ont pas du tout la même idée que moi du concept "vêtement d'hiver"... et que ça ne me dérange pas.
 Mon deuxième seuil fatidique approche, la nouvelle année, qui me propulse en 2012 et surtout vers de longues vacances qui ne feront qu'accélérer ce séjour. Comment imaginer une fin si proche ? Elle l'est sans l'être. Je préfère banaliser Noël pour me concentrer sur mon nouvel an de Tokyo qui risque d'être fantastique... ne serait-ce que pour les retrouvailles.

Enfin bon, joyeuses fêtes à tout ceux qui liront cette ligne !


mercredi 21 décembre 2011

La TV, Episode 1 : Variety

Un exemple simple des programmes de divertissements de la TV "variety" en japonais. J'ai oublié le nom du programme, mais le thème est hallucinant ; Une espèce de scientifique déguisé en colon du 19ème observe avec son assistante des daims qui doivent remplir des missions.

Dans celle-là, des mecs déguisés en daims doivent attraper des bananes hors d'atteinte et sans utiliser leurs mains... D'ailleurs dans tous les épisodes, ils ne doivent jamais utiliser leur mains... A ajouter aux petits cris qu'ils utilisent pour communiquer. Et quand ils meurent, leurs seins explosent...
Ya juste à regarder.


lundi 19 décembre 2011

S'offrir en offrant

Dans quels genre de moments les Français s'offrent-ils des cadeaux ? Noël ? St Valentin ? Anniversaire ?
Tout cela les Japonais le font bien sûr, mais il y a une autre sorte de cadeau. Première aspect, c'est une petite chose, quelque chose d'insignifiant à première vue (qui se mange en général), dont on disait autrefois en le donnant "tsumaranai koto" (= quelque chose d'ennuyeux, banal).
Ensuite, ce petit cadeau se fait généralement entre amis et sans occasion particulière.

En très résumé ce cadeau japonais, souvenir d'une visite de telle ville appréciée ou simplement un petit quelque chose que l'on veut faire découvrir. Ensuite, j'ai remarqué l'importance de l'emballage, avec des choses que l'on m'avait déjà expliqué avant, tout fait sens.
L'emballage du cadeau est presque plus important que le cadeau lui même. Originellement, celui qui reçoit le cadeau ne l'ouvre pas devant celui qui l'a offert, du coup on peut-être au moins sûr de faire plaisir, tout en cachant, avec du beau papier ou autre. Aujourd'hui, l'importance du "kawaii" (mignon) est telle qu'un cadeau doit aussi l'être, c'est donc un papier à petit motif, une petite corbeille ou tout ce qui peut être mignon pour les Japonais. La "valeur" du cadeau est finalement améliorée par un bel emballage (un peu comme en France).

De là à voir l'obsession du "service au cadeau", le pas à franchir est très amusant. Noël oblige, je me suis mis en quête de cadeaux à offrir à certains de mes hôtes. Premier essai, un "centre de cadeaux" au dernier étage d'un deepato (department store = équivalent de nos grands centres commerciaux). Quelques rayons, des dames en tablier nous font goûter les produits qui sont dans les boites. On se promène en scrutant les prix (qui varient de 30 à 130€) des seto (set) proposant soit du chocolat, des parfums, des bières, des produits cosmétiques, du vin, des spécialités de la région, du thé raffiné etc. Après avoir pris un ticket, on attends, puis on parle avec le conseiller cadeau qui s'apprête à expédier le cadeau à l'heureux destinataire ; C'est donc là que mon histoire s'arrête car j'ai dû expliquer que je voulais "juste" acheter un cadeau, l'emmener et partir avec. Du coup, on m'a fait doublé d'autres personnes, tout en s'excusant on m'a fait goûter des produits dans des boites que je pouvais acheter directement. J'ai choisis, la dernière étape avant de payer fut de choisir l'emballage : on m'en a proposé trois différents.

Comme tous les cadeaux, le cadeau au Japon "engage" la personne qui l'offre (à des degrés d'importance variables) d'une part en offrant un emballage soigneusement choisi, d'autre part en offrant quelque chose que l'on a également choisi de partager. Le cadeau, comme ailleurs, "engage" aussi le receveur à un jour le "rendre" sous une forme peut-être différente.
Autre exemple pour le soin à choisir l'emballage. Dans un autre depaato, je voulais acheter du papier cadeau pour emballer les merveilles de France que j'ai reçu la semaine dernière. Alors je demande du "papier pour cadeau", sûrement avec les mauvais mots car on ne me comprend pas tout de suite, puis on me conduit dans le rayon. Deux rouleaux de papiers différents mais une belle variété de petits sacs, de rubans, de scotchs colorés, de sacs en toiles à motifs, d'autocollants pour sceller les paquets et j'oublie d'autres choses encore.




En fait ce qui m'a vraiment marqué dans les cadeaux japonais, c'est bêtement l'importance qu'on leur accorde, le plaisir que les Japonais ont à recevoir les cadeaux (à relier à leur côté enfantillage) qu'ils "doivent" (ou devaient) se garder d'ouvrir faisant alors monter l'euphorie du cadeau, et donc "l'engagement" du donneur. D'ailleurs, après avoir dégusté le cadeau, si on leur dit "c'était super bon", ils répondent souvent "yokatta" (= tant mieux ou alors je suis soulagé, "ouf"). Et encore je n'ai vu que les cadeaux entre amis, j'imagine que cet engagement est encore plus visible lorsque l'employé offre un cadeau à son patron ou l'élève à son professeur.

Les Japonais, que l'on regarde souvent comme des travailleurs insensibles, méthodiques, fourmis qui s'organisent ou mieux excentriques du robot sont en fait d'une sensibilité particulièrement forte et déploient un éventail incroyable d'attentions lorsqu'il s'agit des cadeaux. D'où le petit jeu de mot, quand je vois un Japonais s'offrir en offrant.

La photo est un petit cadeau que m'a offert ma correspondante. Le matcha (une confiserie au thé vert, spécialité de Kyoto) est emballé dans un papier blanc, lui même emballé dans un papier vert, les deux contenus dans une petite corbeille, elle enroulée dans un petit mot, la corbeille placée au fond du sac blanc.


lundi 12 décembre 2011

Venu de France

J'ai reçu mon colis !
Au programme, chocolat, deux champagnes, deux bières, un peignoir, le journal "Ta gueule", du nougat et des pulls.
Un bon résumé de ce qui m'attends pour noël, des cadeaux et la nostalgie (apparemment) chronique des étudiants étrangers le soir de Santa-san (le père N.)

Enfin, j'avais quand même besoin des pulls et du peignoir. En fait, je ne sais pas vers quelle température on peut descendre sur le thermomètre dans ma chambre le soir et le matin, mais mon compatriote m'a dit que dans la sienne on atteint le climat tropical extraordinaire de 6°C. Vu ma tremblote, j'imagine que la mienne ne doit pas être très différente, ça me rappelle les grands moments d'économie de la colocation.
Fallait savoir que les maisons japonaises sont très mal isolées et que l'énergie étant beaucoup trop chère, il n'existe que peu de chauffage central et surtout quelques accessoires du type petit radiateur et couverture chauffante... Loin d'être suffisant.

Ce climat hivernal, qui me pique les doigts au moment où j'écris, trouvera donc une petite entrave dans toutes ces nouvelles affaires. Je suis maintenant ici depuis 3 mois, et les vacances approchant le tout ne va faire que de s'accélérer. Dommage Japon, je t'aimais bien ! Et oui comment ne pas penser au retour, et surtout à l'énigme principale : comment vais-je tout faire rentrer dans la valise ? Mon compatriote et moi sommes déjà en train de nous extasier à l'idée des vacances et vers quelle partie encore inexplorée du Japon nous allons nous aventurer.
Des questions lointaines qui se rapprochent ? C'est peut-être moi qui m'écarte d'un quotidien froid et fait d'une routine grammaticalement japonaise.


Que personne ne se méprenne. J'étais encore en train de rêver à ma  condition actuelle en mangeant des sushis, assis sur un  banc en contemplant Kobe et ses montagnes sur le toit d'un immeuble. A ce moment, un vieux est venu me parler, j'ai pas tout compris mais j'ai quand même réussi à échanger un peu, drôle de sensation. Il a conclu par un fameux "Gambatte kudasai" (fais de ton mieux, en gros), une expression utilisée quotidiennement par les Japonais et qui pour le coup convenait parfaitement à cette période de pré-nostalgie et de doutes sur mon Japonais, qui bien sûr pas encore à la hauteur de mes ambitions. Une apparition salutaire improbable, moi qui ait toujours tendance à voir les Japonais comme plutôt réfractaire au contact, ils sont capables de se doter de la gentillesse la plus désintéressée en très peu de temps... Fascinant et tellement agréable.

Ce petit goût de France que je vais distribuer par petits bouts aux Japonais, j'en avais bien  besoin.
Voilà, pour résumer, on a entamé le mois de Décembre !

dimanche 11 décembre 2011

Sécuritaire ou sécurisant ?

L'obsession de l'insécurité dans ce pays est grande. Notamment par l'omniprésence des "gardes" de sécurité (vieux et à l'air inoffensif), les caméras, les anti-vols et surtout les discours parfaitement naturels sur le nombre de voleurs à la tire, les Chinois qui volent les boutiques, le vol de vélo etc.

La plupart du temps, fantasmes sécuritaires, amenant donc à la création d'un environnement ultra-sécurisant (dont je n'aurai pas fini de mettre des affiche sur le blog) lui même reflétant la peur de l'insécurité.
Bon, toute cette mécanisme complexe de fantasmes, de pratiques, de peurs, de normes pour aboutir à un environnement ultra-sécurisé mais peuplé de Japonais qui ont souvent "peurs". Mais ont-ils le sentiment de vivre dans l'insécurité ? (ce qui serait vraiment le comble). Je le saurai peut-être plus tard....

En attendant, voilà un exemple de ce que j'appelle l'ultra-sécurité : le range-parapluie avec numéro et clé.



mardi 6 décembre 2011

Kyoto, les flammes d'automne

Voici donc les photos du 24 novembre, journée mémorable où je me suis baladé en kimono avec nos amis japonais. Ma plus belle journée depuis que je suis arrivé ici et donc elle ne sera pas facile à résumer dans un petit article. Je ne peux ni décrire la sensation unique qui m'a soutenue toute la journée, ni bêtement le programme (ce serait dommage).

Drôle de sensation de porter La tenue qui fait penser au Japon, déjà c'est franchement beau. Ensuite, c'est un peu lourd, et assorti au Geta (sandales) ça devient hazukashii (embarrassant, un peu honteux) comme l'on dit eux même nos amis qui faisaient, comme nous, leur baptême. Pour autant, la plupart des Japonais qui vous croisent avec un kimono, bon tout le monde vous regardent évidemment, trouvent ça sympa et l'accueille vraiment bien. On les sent entre fiers et envieux, puisque le kimono n'est maintenant porté que pour des occasions très spéciales. Moi qui m'attendais à des regards un peu moqueurs... et de toute façon au bout de quelques heures plus rien ne vous atteint tellement l'expérience est prenante.

Nous avons été traités comme des princes avec un plan qui nous a permis de voir quelques uns des plus beau sites de la ville, le tout en mangeant dans un restaurant ambiancé traditionnel (plutôt même simplement traditionnel).

Les Japonais sont de grands contemplateurs de leur environnement. En automne, ce sont les momiji (ces arbres qui deviennent rouges) qu'il faut venir voir à Kyoto. De réputation impressionnante, les momiji méritent bien tant d'attention puisqu'ils ont transformé la ville que j'étais venu découvrir il y a trois ans.
La nuit étant bien sûr le moment le plus impressionnant, avec des éclairages bien choisis, les momijis explosent et donnent une étrange impression de ville qui brûle.
Le kyomizudera (temple suspendu) brillant dans cette forêt de flammes était un souvenir qui restera longtemps gravé dans ma mémoire.

Kyoto en automne c'est une ville prise dans les flammes, qui renaît de ses cendres chaque année, peut-être depuis toujours comme le célèbre jardin zen qu'elle accueille. Impression d'éternité dans une ville dont je me rappelle qu'elle a failli être la cible du largage de la Bombe...


lundi 5 décembre 2011

Sex-Train

Je me rappelle le scandale de la piscine avec horaires réservées aux femmes. On ne sait d'ailleurs pas si cela était vérifié ou non, mais on se rappelle les ébats de ceux qui se disaient "laïques" et qui combattaient une "avancée de l'islam radical en France".

En fait au Japon il existe des wagons de train réservés aux femmes (un wagon par train mais pas toutes les compagnies et pas toutes les lignes). Pourquoi ? Pour éviter les "chikan", ou "attouchements" en Français.
Phénomène apparemment répandu, le fait qu'un homme touche une femme, profitant donc d'un train bondé, le chikan est sévèrement puni par la loi. La femme touchée doit lever la main et crier "chikan", comme nous l'ont expliqué le staff des relations internationales de la fac au début de l'année.

Un impératif d'efficacité ou alors une bizarrerie japonaise a donc produit ces wagons, qui, peut-être provoqueraient de drôles de discussions en France.
Quoi qu'il en soit, il m'est arrivé plusieurs fois de voir des hommes voyager tranquillement dans ce type de wagon... Peut-être ceux-ci sont-ils victimes des "chijo" (équivalent féminin du chikan) ?

jeudi 1 décembre 2011

Le mot magique

Magique parce qu'incanté seulement dans certaines circonstances. La rencontre avec l'étranger, malgré les apparences, n'est jamais un moment anodin pour un Japonais.
Si vous lui rendez un petit service, que vous ramassez quelque chose qu'il a fait tombé ou n'importe quoi, il vous dira "sanke you" (thank you).
"Thank you" c'est le mot magique, même quand on tente de les aborder en Japonais, dans beaucoup de situations et avec beaucoup de personnes différentes, dès qu'elles verront à qui elles ont à faire : "sanke you".

mardi 29 novembre 2011

Emploi fictif

Un contraste amusant avec la philosophie japonaise du "chacun à sa place" est la présence des agents de sécurité (différents des policiers donc). Ceux-ci traînent un peu partout dans la ville, mais c'est une population qui vit au plus près des chantiers et écoles.
En fait, une autre observation que j'aimerai aborder concerne l'enfantillage chez les Japonais, mais quels faits y contribuent ? Peut-être cette infantilisation dominante (qui me pousse à prendre en photo chaque signalétique) qui peut s'observer objectivement dans chaque situation et surtout au quotidien. Les Japonais, que l'on imagine globalement plutôt sérieux (jamais en retard, c'est vrai), vivant dans un monde à part et parfaitement organisé (la société de service exemplaire). Pourtant, j'ai remarqué l'inefficacité parfois rageante de certaines situations, celles qui sortent du cadre de la règle, et l’irrationalité amusante des agents de sécurité vaut le détour.

Qui sont-ils ? Des hommes (plus rarement des femmes) en uniforme décoré (de toutes sortes) mais sobre, qui veille à éviter les "accidents". L'accident est vraiment quelque chose à ne pas prendre à la légère et comprend aussi tout ce qui relève de l'organisation (accident au sens d'imprévu donc). On ne sait pas vraiment si l'on est forcé de leur obéir (ceux qui font la circulation dans la fac, oui.), d'où sort leur légitimité... Ils sont là à veiller au grain, et prennent leur mission très au sérieux.

Quelques exemples, ce sont eux qui :
  • font traverser la rue dans la fac, pour ne pas que les voitures ne nous écrasent (ça me rappelle les sorties en primaire)
  • patrouillent dans la bibliothèque, en général pour veiller au respect des règles (pas de boissons, pas trop de bruit...)
  • se tiennent devant les chantiers pour faire circuler les piétons (agiter le bras et regarder s'il y a des voitures, ou mieux vous demander de bien vous ranger sur la gauche en marchant pour ne pas trop s'approcher du chantier)
  • rangent les vélos dans la rue (en les mettant bien droit les uns à côté des autres)
  • surveillent le déchargement des camions dans les stocks des magasins (en se tenant au milieu de la rue pour avertir les voitures)
  • se tiennent debout à certains endroits (oui je n'ai vraiment pas pu deviner leur rôle)
  • permettent la séparation entre la file de gauche et la file de droite à l'entrée de l'escalier de certaines gares (aux heures de pointes, oui)
  • aident les voitures à tourner dans une rue jugée délicate
  • aident les voitures à rentrer dans certains parkings
  • surveillent les parkings à vélos (vélos qui sont déjà surveillés par des caméras, protégés par anti-vol et attachés à la machine du parking, oui simultanément)

C'est tout ce qui me vient en tête là tout de suite mais j'oublie certainement d'autres affections, comme quoi j'ai peut-être fini par les banaliser moi aussi...

Enfin un panneau que je peux lire : "Comme c'est dangereux, interdit d'entrer"... Éloquent


samedi 26 novembre 2011

Sabotage

Jeudi, j'ai dû rater un cours pour aller me promener à Kyoto avec des amis (dont trois amis Japonais), le tout en portant un kimono.
Très difficile de faire le récit de cette journée, qui fût la plus merveilleuse depuis mon arrivée ici. J'ai revu des temples et des lieux incroyablement profonds mais cette fois dans l'ambiance d'automne, c'est-à-dire au milieu des Momiji (un arbre qui devient rouge en automne).
Je mettrai toutes les photos plus tard mais je ne suis pas sûr de pouvoir raconter dans un article tout ce qui m'est passé par la tête dans cette journée. Une sensation unique.

Enfin, pour avoir raté un cours les Japonais disent "skip class" ou alors "sabotage" (parfumé d'un accent inimitable)...

mercredi 23 novembre 2011

De quoi château est-il le synonyme ?

En marchant vers le château d'Osaka, on se dit qu'on va une nouvelle fois pouvoir admirer les vestiges du glorieux Japon, celui dont le monde connaissait à peine l'existence et que le Japon se gardait bien de regarder. La demeure d'Hideyoshi, un des trois unificateurs du pays, dont le château serait l'incarnation. Toute la légende des samuraïs, des pleine lune, des kimonos, des batailles épiques s'étaient éteintes dans les lueurs du jardin qui entourent le château, prêtes à être rallumées par une curiosité, une soif de découverte...
Quant à la sortie de la station de train, un bruit sourd se fait entendre. A peine arrivés, un spectacle étonnant s'offre à nous dans le grand parc. Dans une allée, deux groupes jouent leur musique simultanément l'un à côté de l'autre... Peut-être une autre preuve de l'irrationnalité japonaise. En tout cas, le bordel sonore est incroyable, l'ambiance très étrange (des filles en uniforme jaune dansent avec un vieux), puis une ronde et le tout dans le vacarme de deux groupes alors qu'un troisième s'apprête à les rejoindre sur le stand que je n'avais pas encore remarqué.

En évoluant paisiblement dans le parc, depuis lequel on est dominé par la tour principale du château, majestueuse tour or, verte et blanche. On a pourtant du mal à imaginer le grand Hideyoshi se balader, pour la simple raison que le parc est devenu un espace public impropable. Me rappelant étrangement les parcs publics que l'on trouve en France, ceux où l'on trouve toutes sortes de spectacles d'extérieur, avec magiciens ou jongleurs ; c'est mine de rien agréable (parce qu'on le sent) d'être dans un grand espace ouvert. Effectivement, il y a très peu d'endroits au Japon où l'on n'est pas pressé, serré, enfermé. D'ailleurs beaucoup de gens se retrouvent, notamment les familles qui emmènnent les gosses en sortie, eux bloqués devant les types qui font leurs spectacles. Entre le mec qui rentre dans son ballon géant, le jongleur qui discute, le marionettiste qui fait jouer une réplique de Ray Charles, il y a du choix. Et encore, je n'ai vu que le trajet pour aller au château.
Bien avant le château, une autre anomalie du paysage nous frappe. Trois rangées de fanfares, une en survet bleu, l'autre en pompon rouge et la dernière en fourrure blanche... En fait, situé juste à côté du château, un stade de...baseball. Oui cette terrible maladie qui ronge l'âme des Japonais aurait sûrement fait perdre son kimono à Hideyoshi (tout comme sa représentation dans le jeu Onimusha, pour les curieux). Drôle de façon de préserver le "patrimoine" culturel.

Autrement, le site est extraordinaire évidemment. Les hautes murailles qui jaillissent de larges douves sont impressionnantes et à peine pris un peu de hauteur, on domine tout le paysage d'Osaka avec les montagnes en fond. Le sommet de la tour nous offre le spectacle d'une ville énorme, en apparence désordonnée et fièrement verticale. La photo aérienne du château lui rend bien justice, au milieu de ce très beau parc (surtout en ce moment avec les arbres allant du jaune au rouge), un endroit pour respirer sous l'aura d'un vrai monument japonais. Au sommet de la tour du château, la vue est superbe, à l'intérieur on y trouve de belles illustrations (en plus de l'inévitable boutique) qui nous montrent Osaka au 19ème, un petit ensemble de baraquements, au milieu de l'eau, entrecoupés par une cinquantaine de petits ponts de bois. Evolution impressionnante.
Pour le reste, l'intérieur du château étant purement fonctionnel, on n'en retrouve aucun charme puisque tous les étages sont des expositions (seulement en japonais-anglais d'ailleurs, alors qu'on croise pas mal de Chinois) et des successions d'histoires sur le tragique destin de la famille Hideyoshi. Mouais, très peu d'éléments à tâter, quelques vidéos (involontairement) hallucinogènes de reconstitutions "historiques" et voila voila on a du mal à en retenir plus.

Finalement, en ressortant le soir, les lieux sont vraiments agréables. Dans ce grand parc, on sort un peu de l'environnement rapide et étroit d'Osaka pour pouvoir apprécier un peu ce qui fait aussi le charme de ce pays. Tout ça en contemplant la chaine de montagnes qui s'étend au fond dans la lueur rose-orange de coucher de soleil. Un paysage à couper le souffle même si toutes ces tours laissent songeur. A l'inverse des montagnes, on se demande si ce calme au milieu du désordre demeurera. Comment sera Osaka dans 20 ans ? Une ville qui a muté si vite, qui s'est déjà transformée en 20 ans...



vendredi 18 novembre 2011

La rigidité c'est d'abord l'absence de souplesse

Enfin réussi à m'inscrire au training center. Cette superbe fac possède un centre de sport sur quatre étages avec de l'espace et de belles machines prêtes à faire gonfler abdominaux et pectoraux.
Petit problème, une simple formalité ne suffit pas. Il fallait assister à une réunion en début d'année sur comment utiliser les locaux. Admettons. Nous ratons cette réunion, impossible de s'inscrire en tant qu'étranger, en tout cas c'est ce que nous comprenons.
Pourtant, après d'âpres négociations, nous arrivons à obtenir le droit de revenir avec un papier pour s'inscrire. Papier qu'il a fallu acheter auprès d'un distributeur, lui même situé discrètement dans un des nombreux bâtiments de la fac. Revenu avec le papier, les types qui gèrent le training center nous font comprendre qu'on ne pourra pas l'utiliser car la réunion obligatoire sera dispensée en Japonais et qu'il faut absolument la comprendre. Et c'est tout, fin de la discussion, merci d'avoir payé, il n'y a aucun moyen pour vous de faire des tractions au chaud.
Heureusement, un ami arrivé avant nous a pu nous aider et devait donc impérativement être présent pendant la réunion pour traduire les instructions de l'instructeur.

Arrivés à la réunion, on demande de remplir une petite carte d'identification, dont le schéma (oui, celui du bout de carton que je tenais entre mes mains) est reproduit au tableau par l'instructeur. Ensuite, des informations capitales seront données comme "utiliser lentement les machines", "soyez courtois avec les autres utilisateurs" "ne parlez pas trop fort" "au 2ème étage il y a ceci..." (tout étant indiqué sur une brochure récupérée à l'avance) ou alors les horaires d'ouverture et de fermeture (affichés et présentes dans les deux brochures de présentation de la fac).
Vient alors une vidéo de cinq minutes, tourné caméra à l'épaule par le staff pour nous montrer "en vrai" l'utilisation correcte de quelques appareils. Certains passages de la vidéo sont montrés deux fois et l'instructeur y superpose d'autres explications supplémentaires. Hallucinatoire.

En  faite cette réunion était complétement évitable, elle vous fait juste perdre 30 minutes mais est pourtant indispensable pour s'inscrire. En effet, on aurait pu rester avec nos dix euros foutus en l'air si l'on n'avait pas eu de traducteur pour comprendre ces éléments essentiels. Plutôt désagréable.
La société japonaise, qui passe pour une société parfaitement organisée et donc d'une efficacité exemplaire, me semble complètement dépassée dès que l'on déborde du cadre. En tout cas cette petite société qu'est l'université Kangaku peut aller jusqu'à une inefficacité parfois rageante, car surtout à notre détriment, nous les pauvres Gaijin. Et ce n'est pas le seul exemple de lourdeur incapacitante, je vous en dirai plus après avoir récupéré mon autorisation de travail.

samedi 12 novembre 2011

L'extra-ordinaire du quotidien

Kangaku, ou Kwansei Gakuin, la fac où je suis maintenant depuis deux mois. Je ne presenterai pas complètement la fac, une page wikipedia lui est dédiée...

Des reproches (insistants et violents, pouvant conduire à des émeutes) m'ont été faits comme quoi on ne voyait pas assez mon quotidien sur ce blog.
Afin d'éviter tout bain de sang, c'est chose faite à partir de maintenant. Alors, les photos ayant été prises pendant le festival de l'école, ce n'est toujours pas le quotidien pur et parfait (imaginons qu'il n'existe pas) mais au moins un aperçu des bâtiments, des gens et de l'ambiance.
Je précise donc que toutes les photos hormis quelques rares prises sur une route, qui est le trajet que je fais quotidiennement à pied, sont des photos prises à l'intérieur du campus.

A peine rentré dans la fac, en ce jour de festival, la foule est partout, des stands de bouffe rapide partout tenus par les clubs et cercles rappelant une joyeuse fête de l'Huma.
La difficulté, voir l'impossibilité dans certains cas, de participer à un club en tant qu'étranger s'oppose vraiment à cette vision accueillante, tapageuse du club. C'est la première fois que je voyais des Japonais harceler les gens pour leur vendre des petits trucs, ça ressemble beaucoup aux scènes de rue dans les pays du Maghreb que l'on m'a décrit.
Provoquant une rupture tranquille avec leur quotidien, les clubs sont des espaces fermés où l'on se retrouve pour participer à une activité (jusque là rien d'exceptionnel) mais c'est en fait la vie sociale entière qu'aspire le club. La plupart du temps, on ne voit que les étudiants portant les mêmes blasons se balader ou manger ensemble, et très souvent les sorties du week-end se font entre gens du club. C'était donc, dans ce festival, l'occasion d'une activité comme une autre pour le club, à ceci près que certains ont dû porter des costumes de lapins, et d'autres des pancartes sur le dos... toute la journée.

Au milieu de ce décor inhabituel, j'ai pu me balader en croisant la joie et le stress de ces clubs mais aussi les spectacles de danse, les kimonos, les lapins, les peintres en exterieur etc. L'univers assez folklorique, bien plus élaboré que les heures du soir à la fac, qui se rapproche vraiment du film After Hours, croise les lieux habituels et pourtant hallucinants : petit jardin, lac, supermarché, subway, officiers de circulation, gymnases immenses (le tout dans l'enceinte de la fac).

J'ai noté un contraste intéressant, et à mon avis révélateur d'un certain trait japonais, entre la devanture et l'arrière-boutique.
Dès l'entrée, sur la grande pelouse et sous le plus impressionnant bâtiment sur lequel règne la devise de la fac "Mastery for Service", c'est l'officiel. Par officiel, j'y vois les discours interminables que sont obligés d'écouter une masse d'étudiants en uniforme, les portes étendards s'ennuient un peu plus je pense, l'orchestre qui accompagne les transisitions, les interventions des anciens de l'université parlant de l'esprit de ce corps particulier (et eux ils ne sont plus tout jeune), les drapeaux et les photos étant le décor des alentours de cette devanture.

Et en entrant un peu plus dans la fac, une autre facette s'offre à voir. C'est les ventes style maghrebin d'amuse-gueule, les invitations en folie, les costumes de lapins, les cheerleaders, le maquillage excessif, les vêtements courts, les peluches, les spectacles de danses chaudes qui s'enchainent, dans une salle c'est une reproduction d'un jeux TV etc...
C'était d'ailleurs l'occasion pour moi d'assister à un manzai (spectacle de stand-up japonais). Le manzai c'est un spectacle comique originaire du Kansai (là où je suis, pour ceux qui suivent pas) et donc executé avec l'accent du coin. Très ancien, développé aux alentours du 9ème siècle et perfectionné durant le 17ème siècle, c'est-à-dire bien antérieur au stand-up américain dont je croyais qu'il était une pâle copie, il fait un peu la fierté des gens du coin face aux vilains tokyoites.
L'idée c'est de raconter des blagues, le tout étant très visuel, de faire des quiproquos, mais le plus intéressant reste le duo (qui aura marqué les débuts de Takeshi Kitano) où s'opposent, devant un même micro, un personnage "sérieux" et un "débile" qui ne comprends rien. Malheureusement, n'ayant pas compris grand chose moi non plus, je ne pourrai pas expliquer plus mais je dois dire que ça m'a vraiment marqué.

L'université nous présente des gens qui s'apprêtent à rentrer dans la vie active, on peut donc imaginer qu'il s'agira des mêmes personnes une fois "adultes". Mais pas vraiment, les Japonais, et surtout les Japonaises, ne ressemblent en rien et nul part, à cette fantaisie ambiante, à toutes ces gamineries qui semblent les maintenir si loin du monde "sérieux". Sur simple observation, je croise beaucoup plus de filles à l'université que de garçons, pourtant on n'en retrouve que peu à exercer des fonctions à hauteur de leur qualification. Kangaku est une fac privée, prestigieuse et pas vraiment ordinaire peut-on me répondre mais je dirai que concernant les clubs et la vie sociale étudiante elle ne varie pas tant que ça selon les universités. Rencontrer les jeunes du Japon, c'est le moment idéal pour rencontrer des gens qui s'apprêtent à changer de manière impressionnante, parfois pour rejoindre l'opposé de cet idéal de vie.

Je cite pour conclure une observation géniale que fait Ruth Benedict, auteure d'un bouquin de référence qui fait l'anthropologie de la société japonaises des années 1940, certaines réflexions sont encore pertinentes aujourd'hui... faut-il conclure que les Japonais ne changent pas ? Autre problème mais cette observation m'est revenue en tête au moment où j'écrivais :

"La trajectoire de la vie au Japon est traçée à l'opposé de ce qu'elle est aux Etats-Unis. C'est une grande courbe en U peu accentuée, avec un maximum de liberté et d'indulgence au bénéfice des bébés et des vieillards. Les contraintes croissent lentement après la prime enfance jusqu'au moment où la liberté d'agir à sa guise descend au plus bas avant et après le mariage [...] Enfance et vieillesse sont des 'espaces de liberté'."



dimanche 30 octobre 2011

Ascensions

Hier, samedi, après-midi à Kôbe.
On a prévu de grimper jusqu'au sommet du Mont Rokkô, une des nombreuses montagnes vertes au pied desquelles la ville s'étend. On pensait donc ne pas avoir le temps de flâner (serait-on déjà tranquillement blasés en se baladant ?) mais sur le trajet, nous étions rentré dans les merveilles du monde d'Alice.

En fait, la première ascension c'est l'arrivée dans le Kitano-cho (quartier des résidences occidentales). Un quartier en hauteur où des maisons européennes (style colonial le plus souvent, des vieilles baraques avec beaucoup de bois et des toitures étrangement délabrées) côtoient le temple shinto du coin.
Les Japonais viennent y traîner en s'amusant de ces caricatures exotiques (à mettre à côté des nombreuses choses que les Japonais aiment caricaturer), mangent des glaces et se prennent en photo devant les maisons. En même temps, l'ambiance fait vraiment penser à Montmartre, une petite plateforme en hauteur avec vue sur le reste de la ville, pas mal d'artistes dans la rue (acrobates, dessinateurs...) qui amusent des petits groupes d'intéressés.

La deuxième ascension commence derrière la gare centrale de Kôbe. Un passage improbable sous la gare lance le circuit pour faire grimpette, au milieu d'une forêt, à côté d'une rivière dont la source est une superbe chute d'eau perdue.
En s'enfonçant sur la piste, à l'image d'Alice, beaucoup de rencontres étonnantes dans la nuit d'un chemin qui rendait très bien l'atmosphère de Jurassic Park. L'ascension magique nous aura mené à un groupe de salary-man complètement faits, posés à contempler la  baie de Kôbe pour les plus décents, philosopher bizarrement sur les bancs pour les plus intrigants et s'évanouir au milieu de leurs potes pour les plus décadents. Ils ont du en redescendre un en le tenant par la ceinture.

Rencontre avec un chat noir qui valait 5000€. Impossible de savoir s'il s'agit d'une blague mais on tombe sur un petit matou noir, et 20m plus loin sur une affiche avec sa photo et une somme pour le moins intéressante (500 000 yen) mais sans numéro de téléphone, ni adresse. Un peu comme Alice, ce chat perdu au milieu d'un point d'observation nous parlait, il nous promettait une belle récompense ou une blague débile.

En avançant, à mesure que la nuit nous devance, croisé deux Américains dont la famille venait de Louisiane et l'un d'eux parlait un français étonnement correct. Rencontre improbable, son message n'en est pas moins perturbant : la route que vous suivez est sans fin (nous avions encore l'espoir d'atteindre le sommet), vous croiserez peut-être une espèce de sanglier qui peut vous foncer dessus donc faites attention, je vous conseille d'aller voir le "Reservoir"  avec un accent magnifique (Quoi ?? Barrage en fait), ah vous êtes à Kangaku, ma fille aussi, elle est super mignonne d'ailleurs, je suis allé chez un restaurant français de Kôbe, Chez Olivier, tu connais pas ? La serveuse est miam.... etc. Le type avait la quarantaine et faisait sûrement visiter le coin à son père. Vu le contexte, on ne devrait plus jamais avoir à se fier aux probabilités, surtout quand on a vécu l'équivalent d'une séance de thé avec le chapelier.

Peu de photos malheureusement, mais la prochaine ascension sera sûrement plus réaliste (préparée à l'avance pour vraiment aller au sommet), car malgré ce petit récit comment rendre compte de cette indescriptible atmosphère tanguant entre l'improbable et l'inévitable. Je ne peux, pas plus qu'Alice, qui est la première surprise par tout ces surgissements, l'expliquer...

jeudi 27 octobre 2011

Coïncidences étrangères

Aujourd'hui me voilà devenu, officiellement, un résident étranger sur le sol japonais. Une belle carte d'immigré avec ma pire photo, une vérification rapide des chiffres, un remerciement et c'est bouclé par les fonctionnaires. D'ailleurs, la mairie qui ressemblait au hall des improbables avec ses fauteuils pour regarder la télé, qui elle diffuse les chaînes animalières, ses campagnes de prévention pour une meilleure hygiène, son assurance vie devant laquelle une troupe de personnes âgés (très âgés, selon nos critères) attendent tranquillement et j'en passe. Toujours en activité, débordée au point d'exploser mais sereine, austère, fonctionnelle, délabrée, bref un hôpital.

Mais avant de recevoir ce privilège j'ai dû passer sur le corps d'un membre des forces de l'ordre. Je me dirige en vélo vers la mairie, et d'un coup un policier (armé, ça m'a surpris d'ailleurs) me demande gentiment de m'arrêter.
Il me demande si en japonais c'est bon, je fais comme si...
Je pensais que ma chemise violette n'était pas à son goût ou alors j'ai peut-être malencontreusement traversé hors des clous... je reste calme. Et là, apogée de l'ambiance policière, il m'interroge sur le vélo. Il appelle ses collègues et relève le numéro sur le vélo. Je lui explique qu'il appartient à ma famille d'accueil. Il reste très gentil et souriant, malgré le fait qu'il m'arrête sûrement parce qu'il suppose que je l'ai arraché des bras d'une mamie sans défense.
Je lui montre ma carte temporaire, il note que je suis étudiant étranger, et me laisse partir en me disant de « faire attention » (gentiment encore une fois).

Je repars, surpris par le paradoxe du policier méfiant (après tout il m'arrête) mais patient, inquisiteur (il appelle ses collègues et regarde mon vélo pendant 3min) mais extrêmement aimable.
Je rigole en me rappelant qu'il n'arrêtait pas de s'excuser...

Où est passée la fièvre ?


mardi 18 octobre 2011

Western Style

Aujourd'hui j'ai pu m'acheter une chemise Yves St Laurent pour 15€. Comment ? Et bah une brocante était organisée dans la fac... Autre preuve que ce campus est vraiment dingue, puisque quelques jours avant c'était un concert de rock (en plein milieu d'une cour) et régulièrement les mecs qui gueulent en jouant du taiko (tambour) ou les cheerleaders accompagnées d'un orchestre qui répètent en public...

Je finirai par mettre (et faire d'abord) des photos du campus, qui le jour, est une usine, et la nuit, un dérivé d'Alice aux pays des merveilles.

Bref, Western Style.

dimanche 16 octobre 2011

Du souterrain aux étoiles

Vous êtes une fourmi. Pas facile de parcourir de longues distances et quand nous on survit dans les grandes villes vous distinguez à peine le ciel. Pas grave, il y a toujours des choses à faire, vous avez beau tenter de flâner, c'est le flux de vos congénères qui vous rattrapent et vous entraînent.
Bons et mauvais aspects, vous les partagez, vous les définissez, les créez.
Menacées comme délaissées, les fourmis que vous êtes construisent des galeries souterraines. Le ciel, à part lorsqu'il pleut, n'étant pas une grande préoccupation des fourmis (contrairement à nous), les galeries comme principe de vie sont assez faciles à accepter. Ces galeries sont des lieux de vie impensables, elles abritent ce que l'on trouve à la surface mais en mieux organisé, conçues pour gérer les fourmis de leurs besoins les plus simples jusqu'à des attentes relativement luxueuses. Ceci inclut banques, restaurants, salons de massage, drogueries, boulangeries, magasins divers qui s'éparpillent dans un long réseau pouvant couvrir une bonne partie de la ville émergée.



Par exemple, quand les fourmis ont pris goût aux graines de café qui trainaient de temps en temps sur le sol, difficiles à chercher, pénibles à distinguer, parfois coûteuses. Elles ont creusé, en galerie, des espaces réduits, automatisés, pour profiter d'un café mais où l'on ne doit tacitement pas passer plus de 30 minutes sous peine de retarder les autres.

Autre exemple, les fourmis aiment manger, pourtant le cadre de leur vie quotidienne ne leur permet pas de s'attarder sur un copieux repas.
Alors les fourmis, amies de l'utilité et de la fonction, ont inventé les "Izakaya" (en langage fourmi), qui n'est pas définissable mais repose sur des principes de construction de base : espace semi-clos, restreint, serré, accueillant, chaleureux, convivial, abordable, arrosé, rapide, inconfortable et sécurisant. Sorte de petits restaurants, comme on dirait chez nous, les fourmis s'y attablent et avalent leur repas avec leurs amies en profitant de pauses bien méritées pendant que d'autres, perdues dans les galeries, cherchent leur repas.

Travailleuses, les fourmis sont capables de construire des villes, et leurs réseaux souterrains, qui dépassent notre imagination. Nous n'avons que quelques clichés sur eux, aussi bien photos que préjugés, et les réduisons trop souvent à leur qualité stricte de fourmi. Pourtant, les fourmis aspirent aussi à l'émancipation, elles bâtissent des villes qui s'enfoncent dans le sol et montent jusqu'aux nuages.

Au sommet de leurs achèvements, on aperçoit les montagnes, on imagine ces pauvres fourmis qui tentent de devenir des oiseaux. Leur monde, si parfaitement fonctionnel et organisé, contraste et rejoint une sensibilite permanente et un desinteressement occasionnel. On n'a qu'a croire qu'elles ne voient pas le monde.
D'ailleurs, une fois arrivées en haut, au dessus de l'infini entravé par la nature, au dessus de l'ingérable qui se gère, l'activité intensive des fourmis les a privé (probablement à tout jamais) de voir les étoiles.





lundi 10 octobre 2011

Les Japonais aussi aiment le poulet

(Re)Tour à Nara

Dans le Kansai, j'ai la chance d'être très proche de villes merveilleuses, « authentiques » diront les habitants de la région (assez fiers de leur différence avec les gens de Tokyo).
Comment qualifier Nara ? Ville aux lanternes ? Ville aux cerfs (shika) ? La ville-forêt ? Il est déjà même difficile de parler de parc ou de forêt ; la colline qui abrite, sur un grand espace naturel, les temples est une forêt ouverte mais aussi un parc (mais non fermé donc).
J'hésite mais imaginons qu'elle soit inclassable.
Nara c'est l'ancienne capitale du Japon archaïque, une sorte de lieu de naissance de la « civilisation japonaise » (avec Kyoto, très proche). On trouve à l'est de la ville, qui concentre des temples shinto et bouddhistes, une formule de tout ce qu'on peut imaginer du Japon (au delà des villes) sans l'avoir vécu : forêt froide et silencieuse, sanctuaires isolés et lanternes de pierre qui bordent les routes.

La ville baigne dans une tranquillité relative, elle est plus basse, moins rapide. Mais c'est aussi le Japon d'aujourd'hui et pas une image figée dans l'éternel, donc pas mal de voitures, beaucoup de piétons, des hauts-parleurs dans les rues, les conneries habituelles (un restaurant de falafel) et plus de touristes que dans la plupart des villes (c'est-à-dire qu'ici ils sont visibles). Toutefois, Nara est une ville où l'on peut se permettre d'ignorer ce monde, et franchir la barrière invisible qui mène dans la zone sacrée est une chose que j'ai rarement pu apprécier ailleurs.

A peine sorti de la gare, le premier objectif est de louer un vélo. On loue des vélos à la journée pour pas cher. Bien sûr la zone des sanctuaires étant située sur une colline, on travaille ses cuisses toute la journée. Mais le bonheur d'une flânerie en vélo, aux milieux des temples, en passant par les petites rues et les grands chemins dans l'ombre de la forêt est unique.
Plutôt que de choisir un circuit en vélo prédéfini et maximisant votre nombre de sanctuaires visités, on essaie de se perdre dans le parc, trouver les sanctuaires au hasard de la fatigue ou de l'ambiance. On se retrouve en fait, dès l'entrée du parc, obligé de s'arrêter pour s'ébahir devant les cerfs, animaux sacrés de la ville, qui vivent dans un grand espace de liberté (dans la forêt mais sans barrières autour de celle-ci). On croise souvent des petites mamies souriantes qui vendent la seule nourriture autorisée pour les cerfs, éparpillées un peu partout et pas seulement près des boutiques où on peut acheter tout ce que vous imaginez en « merchandising du cerf » (t-shirt, porte-clé, talisman, gadgets pour portables, peluches, cartes, trucs en plastique) à des prix auxquels seul le vrai touriste pourra céder. Une aventure dans l'aventure c'est de nourrir ces bêtes, car cela revient à s'attirer une armée de bambis qui viennent vous bousculer pour leur repas, selon les affiches de prévention ils disposent même d'un sacré arsenal allant du « kick » au « knockdown ». On croise quelques enfants qui pleurent, les jeunes japonaises qui viennent faire leur sorties du w-e et évidemment beaucoup de familles (en plus j'y suis allé un samedi, donc pas très représentatif de l'ambiance de la ville). Jamais autant entendu de « kowai » (« ça fait peur », et oui bambi n'est pas forcément inoffensif) et de « kawai » (« mignon », oui quand même) dans la même journée, drôle de vision du sacré...

A midi, le repas c'est Gyudon (bol de riz avec du boeuf) et bière dans un petit restaurant typiquement japonais : les tables sont séparées par de petites barrières créant ainsi son petit espace à demi fermé, une allée centrale divise la petite pièce en deux dans laquelle circule la dame qui prend les commandes (toujours à voix très haute et sans attendre de merci ou de s'il vous plait).

Retour dans le parc, mais cette fois en s'enfonçant vers le calme. La force des lieux, c'est bien le silence, la nature omniprésente (les sanctuaires, anciens, se trouvent très souvent en forêt) et en même temps un grand détachement (qui en découle ?).
Le sacré, comme d'habitude au cœur de la société, est en même temps relégué, déplacé et donc physiquement isolé alors même que les temples sont ouverts (au contraire par exemple des églises, fermées). Invisible quand il est dans les corps, il explose de visibilité lors des matsuri (festivals) où de grandes processions sont l'occasion de fête et de réunion. Nara est une ville où l'on médite, à méditer.

Avoir un choc spirituel, c'est connu dans le monde quand on approche de la Mecque ou à Jérusalem mais au Japon c'est autre chose. Les spécificités de la religion au Japon sont la synthèse et la tolérance. J'avais d'ailleurs lu quelque part ce proverbe japonais, amusant et peut-être révélateur : « On peut même prier une sardine, c'est une question de foi ». Il est donc intéressant de trouver des temples des deux confessions qui s'avoisinent, voir partagent le même sanctuaire... chose que je n'imagine pas tellement en France. On peut voir là dedans un pragmatisme (« exotique ») mais dès l'origine, l'ancien nom de la ville était Heijo ou « cité de la paix », jusqu'à aujourd'hui où quelque temples (dont le grandiose Todaiji, qui abrite le Bouddha) sont patrimoine mondial de l'humanité, on décèle la reconnaissance d'éléments plus profonds.
Le shinto est la religion « autochtone » du Japon, pour autant il n'est pas l'essence du pays dans lequel on pourrait puiser toute la compréhension des habitudes et mœurs japonaises. Le mystère social est toujours à l'œuvre dans ce pays, avec ou sans religion, car les Japonais (contrairement à ce que j'ai pu voir d'autres pays) donnent une incroyable impression (voire illusion) d'homogénéité.

Nara est une ville spirituelle, elle renferme un esprit qui nous est inconnu. Inconnu mais pas méconnaissable, puisqu'il se donne souvent à voir. Voir et revoir, vivre et revivre des lieux c'était cette journée à Nara. Peut-être parce que j'étais déjà venu il y a trois ans, et que beaucoup de souvenirs sont remontés, c'est ici que j'ai réalisé, après un mois (bientôt jour pour jour), que je vivais au Japon. 




samedi 8 octobre 2011

Men In Black

Le grand fan de Tommy Lee Jones que je suis apprécie la consécration du style. Dans la gare d'Osaka, il est partout, fier comme un président en campagne.
Tout le monde s'en fout de la gueule de Steve Jobs sur la page d'accueil du site d'Apple...



mardi 4 octobre 2011

Vous savez maintenant...

Que le camion-poubelle qui passe le lundi et le mercredi devant chez moi fait sonner une petite musique, comme les camions de glaces.

dimanche 25 septembre 2011

Ivresse, nationalistes et décadence. Première nuit à Namba, Osaka.

Depuis Umeda, pas d'autre choix que de prendre le métro. J'ai enfin vu des wagons "women only", pour éviter les atouchements. A voir ça, on pourrait croire que le métro japonais est, aux heures de pointes, le paradis des frotte-man du monde entier. A vérifier.

Arrivée à Namba où un autre Osaka se dévoile, la ville de la nuit. Ce monde là on peut le discerner même en pleine après-midi. Le Dotonbouri à Namba et l'Amerika-mura (quartier américain), qui abrite un Burger King ouvert H24, sont des endroits vivants, où l'on peut trouver beaucoup de choses à bon compte. Surtout la nuit. Surtout si on aime boire. Surtout si on aime manger. Et surtout si on aime les hôtels.
Dès l'entrée dans le quartier, dont on aperçoit l'infinitude de la rue à l'horizon, on trouve des rues remplies d'hôtels où on peut s'y "reposer" pour une heure ou deux. La pudeur amusante des "Love Hotels" contraste parfois avec d'autres endroits plus assumés. Un pur bonheur visuel pour les pervers. Les endroits sont vites repérés mais il y a une sorte de discretion qui fait que ça peut ne pas frapper.

Arrivée dans la galerie couverte et sur le fameux pont central du Dotonbouri, on peut difficilement parler de "vie", il faudrait plutôt parler de vague humaine. Une vague qui ne suit pas exactement les rythmes naturels puisqu'ignorant le soleil comme la lune, elle est l'essence d'un véritable temple de la nuit. Le pont déborde, la clientèle plus fêtarde la nuit donne d'ailleurs un autre aperçu du même chaos. L'épicentre du quartier est ici, un canal étroit bordé d'immeubles, eux couverts par d'immenses panneaux publicitaires rayonnants de couleurs vives.
Le quartier, de l'autre côté du pont, est hallucinant. On y trouve de tout mais souvent en plein air et moins cher. Les façades des immeubles sont presques toutes des délires dont le psychédélisme rivalise avec un babar (ou télétubbies au choix) : crabe, poulpe, barbu, vache suspendue, sushi, poisson-bulle et j'en passe...
Heureusement les rues se vident quand on avance un peu, on trouve presque du calme dans un temple perdu au milieu de cette décadence, une petite enceinte de tranquilité étrange où une file attend sagement de pouvoir prier devant le sanctuaire.

Bières dans un petit bar sympa, ambiance occidentale avec musique punk d'ados et Bugs Bunny sur les écrans. En partant, le type se trompe dans la note et nous offre donc une tournée, la soirée commence bien.
Nous croisons un cortège de nationalistes (enfin !). Une foule ordonnée brandit des drapeaux et scande les mots forts du discours de leur leader. Le leader est une petite bonne femme déguisée en servante (pourquoi ?) qui hurle son texte à travers le micro, la conviction est puissante, ça en est presque frissonnant. Une véritable hardeur se dégage du cortège, qui reprend sa route après une petite pause régulée par deux policiers en uniforme. Une affiche en anglais : "nous refusons que Fuji TV diffuse des séries et des Idols venues de Corée". Un fait qui nous semble insignifiant, comme un programme TV, donne lieu à une mobilisation bruyante et déterminée. Fait marginal ou société chargée d'Histoire ? En tout cas le symbole d'un Japon qui refuse les programmes coréens en précisant "Nous ne sommes pas racistes" mérite une réflexion. Un élément intriguant dans le fait nationaliste c'est qu'à chaque fois que je le croise, il semble amuser les Japonais présents, qui soit sourient, soit filment avec leurs téléphones (en souriant, ça arrive)...

Direction le quartier américain. L'ambiance agitée, les boutiques qui s'étendent, des profondeurs de celles-ci rugit de la pop et du rap. Ces quelques rues, dominées par une discrète statue de la liberté (bien qu'éclairée), forment bien une autre ambiance, une autre nuit. Le temps d'avaler un burger et de subtiliser une superbe affiche japonaise du mythique Burger King, nous repartons vers un bar "Free Drink" que nous avions repérés.
A partir de là, les deux heures de boissons passent en douceur. L'alcool monte, l'ivresse de la fin est impossible à cacher. Nous rigolons et discutons en japonais avec le couple assis à côté de nous, à moitié fiers de nous faire un peu comprendre.

Les souvenirs dès ce moment sont très confus : des marches au bord du canal, un McDo où mon compatriote interpelle un néo-zelandais pour lui gueuler "On va te casser tes genoux demain", le Burger King encore, quelques rues, la nuit...


Le monde des fées à Kôbe

Vendredi 23, fête de l'équinoxe d'automne, soit congé national (oui, encore).
Retour à Kôbe pour découvrir le HarborLand, un quartier du port. En franchissant rapidement la ville, on voit nettement la différence avec Osaka où marcher paraît presque impensable.
Enfin une ville à taille humaine ? Pas exactement. En arrivant à la tour du port, on aperçoit au loin les grattes ciels, frôlés par une autoroute suspendue qui doit traverser une bonne partie de la baie. La démesure est toujours la règle.
Petite montée en haut de la tour pour environ 6€, la vue spectaculaire vaut le coup. En arrivant au moment du coucher du soleil, qui disparait derrière la montagne, plus aucune pensée pour l'argent. La vue sublime, Kôbe ville serrée entre la mer et la montagne est si différente de sa voisine Osaka...

Notre destination ressemble de loin à une blague. Un petit parc d'attraction se profile, entouré par les bateaux et les immenses grues des docks. Mais, c'est au soir, en voyant les grues s'illuminer de vert, face à la tour de Kôbe, elle vacillant entre le rouge et le bleu, que cet endroit apparaît vraiment absurde. D'où sort cette imitation féérique en plein milieu des docks ? Un endroit plaisant, calme et surréaliste.

En entrant dans le « Mosaic », sorte de village-centre commercial sur plusieurs étages, on est accueillit par une boutique Snoopy. Charlie Brown est tripant mais mit à côté des petits restaurants à la française, type « Ballon Rouge », ça rime vraiment à rien. Au bout d'une petite allée commerçante, qui se veut clairement exotique, un petit autel pour prendre en photo les amoureux qui se tiennent par la main. Le panorama derrière l'autel ? Les grues et la grande roue qui brille de mille feux... En descendant, on tombe sur un mini parc d'attraction ouvert, avec maison fantôme, manège, montagnes russes et la fameuse grande roue... un endroit incroyable dont le romantisme est la clef. Encerclé par les buildings qui s'allument, ce petit coin bercé par les couleurs d'un Walt Disney donne une autre vue du port. Le panorama nocturne de la baie est réellement apaisant. Un autre petit îlot absurde de lenteur, de calme et de vie...

La glandouille paisible se termine par le quartier chinois, qui est vraiment magnifique la nuit (sauf quand on n'aime pas le rouge et le jaune). Le quartier est petit mais l'ambiance est prenante, on marche à la recherche du moins cher, pourtant on garde la tête en l'air pour admirer le mariage des immeubles de briques et des lanternes. Gyozas et bières, servis dans un petit rade à quatre tables avec vue sur les passants de la rue. Au fur et à mesure que la nuit tombe, les restaurants et magasins ferment... dommage. Nous partons vers 21h30 et le quartier est presque calme, pour pas dire mort.

Retour à la gare, il faudra trouver un autre endroit pour traîner la nuit à Kôbe. Ou alors peut-être que cette ville est le penchant paisible et plaisant de sa voisine Osaka ? On en arrive presque à être étonné de voir un cycle naturel se mettre en place dans des endroits aussi démesurés... et oui, peut-être qu'à Kôbe, on dort la nuit.


lundi 19 septembre 2011

Nostalgie

Errance dans les couloirs d'Umeda

Aujourd'hui jour férié, la fête des retraités (sérieux), je décide de passer l'après-midi à Osaka (toujours dans le quartier d'Umeda).
Autour de la gare centrale, la vision de la surcharge, de la démesure, de la vie qui s'éparpille. De grandes avenues bordées de buildings partent dans tous les sens alors que les labyrinthes marchands souterrains s'activent continuellement, les rues sont propres, on croise quelques SDF et les activités quotidiennes ainsi que la masse se perpétuent.

On m'a indiqué un temple shinto à aller voir dans le quartier, mais j'ai encore envie de me perdre donc je tourne dans tous les sens au gré du flair. Une fois encore attiré par l'immense galerie couverte, j'évite soigneusement les passages déjà vus et tourbillonne en alternant petites rues et artères majeures. Une nouvelle série de photos s'impose à moi, les mots et expressions en français : "boulangerie Refrain", "Café Amour", "lagare shop", "Club étoile du soir" sont maintenant des réalités que je ne peux plus nier.

Après avoir fait un saut dans un combini (petit magasin généralement ouvert H24) pour déguster un café froid à 1€, je reprends ma route avec détermination et me fie à une galerie dominée par des drapeaux où je crois reconnaitre le nom du temple. Chaque changement de galerie est l'occasion de tomber sous le poids des grattes ciels, je me dirige donc à l'abri de cet univers en me réfugiant sous le regard bienveillant d'une tête de japonaise qui sert de décor et de repérage pour le chemin du temple.
Un arrêt au McDo (mon 1er), le "Aurore-Chicken", burger à 1,50€, et un peu d'eau. Ambiance. Pas un bruit, une petite musique apaisante circule entre les tables, des hommes seuls, des femmes seules, une mamie. Nous sommes au 1er étage, je commence à m'habituer aux petits espaces et pas vraiment le choix puisque cette salle doit faire pas plus de 25 places, un îlot de lenteur dans ce monde de la vitesse qu'est Osaka. Ordinairement, lieu (plus ou moins) de vie, la moitié des personnes dans la salle roupillent, soit la tête en arrière, soit les bras croisés dans leur plateau. Il semble que les Japonais ait trouvé le moyen de créer des espaces de vie inanimés.

Un petit accès au temple se trouve à côté du McDo, je m'y aventure et tombe finalement sur l'enclos sacré que je cherche depuis environ deux heures. Un jardin perdu au milieu d'immeubles de verre, quelques arbres, on marche sur de petits cailloux blancs, quelques salary-men viennent prier, ils rigolent et parlent fort... le peu de gens sur place ne semblent pas dérangé. Bien sûr le temple, plusieurs sanctuaires autour, un chat se balade sur les toits, pas vraiment de bruit ou du moins on n'y fait plus attention. Je franchis le tori (porte) et retrouve le système Umeda.

Le système Umeda, c'est le choix entre les artères et les veines. Un étonnant système de couloirs, dans lesquels on passe, en densité de population, du concert de métal au Sahara. Repérage délicat, beaucoup de ces petites veines se ressemblent, elles ont d'ailleurs plus ou moins les mêmes fonctions : clubs, hôtels, "girls' bar" et petits restaurants. Des lieux de vie inanimés. Les cables éléctriques qui surplomblent ces longs couloirs disparaissent aussitôt que l'on rejoint les artères, où il faut là compter avec les voitures, taxis, bus, piétons et vélos.

Une anatomie des couloirs d'Umeda est amusante, on trouve facilement l'alternative entre les deux systèmes de couloirs : l'univers de la vitesse et du travail (buildings), monde ouvert où la hauteur règne contre les étroites allées dans lesquelles s'étendent de petits espaces de détente, où l'on aperçoit difficilement les grands axes ; et pour les galeries où abondent les pachinko, étant couvertes, le ciel et l'air n'y existent pas. Une histoire de contrastes.

L'Umeda d'aujourd'hui m'a permis de faire un tour dans l'arrière du décor, les endroits qui n'intéressent pas grand monde. A la tombée du jour, les lumières des ruelles s'éveillent et les tours avoisinantes s'endorment.
Dans ce début de sommeil, les embryons de vie qui émergent en dessous de la ville sont ces moments que nous avons peut-être le plus, non seulement à vivre dans la surprise, mais surtout dans la magie de l'ignorance.


dimanche 18 septembre 2011

Banzai Burger

Kôbe, première impression

Arrivée à Kôbe en début d'après-midi, atmosphère un peu plus détendue qu'à Osaka. La foule est toujours là sans être encombrante et la gare nettement moins impressionnante. Sortie à l'air libre (non climatisé), la ville possède tout de suite son propre charme : plus ouverte, plus accueillante (la bière trouvée en 15min pour 2x moins cher), entourée de montagnes vertes... On s'y laisse facilement porter, la flânerie est d'autant plus facile qu'on a pas peur de se perdre et que les rues semblent plus chaleureuses. A l'aise à Kôbe, on a déjà envie de grimper le mont Rokko pour avoir la vue panoramique du HarborLand en passant par le Kitano-cho qui abrite des maisons de type occidental, soit de l'exotisme pur au Japon.

Avoisinant la gare de Sannomiya, au 2ème étage d'un immeuble sans prétention (comme d'habitude), bar-restaurant étriqué d'environ 15 places, lumières tamisées, trois serveurs-cuistots qui crient les ordinaires « bonjour-bienvenue-merci beaucoup » avec le bonus du « kampai » (santé) en nous servant les Asahi. Délicieux gyoza accompagnées des deux bières, le tout en méditant sur le lonely planet. La musique jazzy convainc définitivement que l'endroit a le potentiel d'un QG. Les deux bières nous mettent étrangement en joyeuse condition (chaleur, fatigue... ?) et la route vers l'inconnu commence.
Kôbe reste une ville impressionnante, bâtie en hauteur, protégée au nord par les montagnes vertes et ouverte sur la mer par le sud. Un îlot urbain dont on mesure à peine la force, il faut la deviner, la sentir à travers les immenses axes de routes et de building, où l'on croise un peu plus d'occidentaux qu'ailleurs. Touristes ou travailleurs, l'apparente présence des étrangers dans cette ville m'intéresse... à méditer pour plus tard.

Traversée d'une galerie commerçante sous la ligne du train, incapable de réaliser ce qui se passe réellement : trop de monde, trop de bruit, trop d'agitations. Dans ce genre de galerie, on avance lentement et joyeusement, on n'ose à peine s'arrêter, bercé par l'afflux constant des intéressés. Réflexion identique qu'à Osaka : je ne réalise pas où je suis et pour combien de temps, sûrement à cause d'une véritable condition (temporaire très certainement) de touriste.
Repérage nettement plus simple, une ville étroite aux axes larges. Arrivée dans la galerie couverte climatisée, qui traverse au moins la moitié de la ville, un virage à droite pour entrer dans le quartier chinois (Nankin-machi). Le quartier déborde de foule dès l'entrée, beaucoup de restaurants, les lanternes jaunes, les immeubles rouges « à la chinoise » et bien sûr l'odeur de la cuisine sucrée qui enrobe ces quelques rues. Un bon endroit pour manger apparemment, ce sera à moi d'y trouver autre chose... Ce ne seront ni le stand de glace turque ni la boutique « Bruce Lee » qui vont neutraliser cet endroit, enfin je l'espère.

Retour dans la galerie, qui finalement nous aura occupé pour ces quelques heures de l'après-midi. Pause exotique dans un café-restaurant à l'européenne. L'occasion de déguster une « pizza-toast », une imitation étrange saupoudrée de parmesan, définitivement une arnaque, mais une arnaque amusante.
Nous n'osons pas continuer plus loin dans la galerie, qui semble vraiment très longue, par manque de temps. Revanche à prendre sur une ville dont on dit que la nuit la métamorphose.

Le soleil se couche lentement, les masses de piétons qui encerclent la gare s'affairent, retour dans ce cher train de banlieue, dans lequel les passagers dorment déjà à moitié.


samedi 17 septembre 2011

Le salary men en déroute ou la mise en garde contre la prostitution

Osaka, découverte

Quelques stations en train et environ 4€ me suffisent pour aller à Osaka, à la station Umeda. Dès la gare d'Umeda, comme quasiment toutes les gares du Japon des grandes villes, un centre commercial sur plusieurs niveaux vous propose un labyrinthe dans lequel une foule digne d'une heure de pointe parisienne se dirige dans tous les sens.
L'idée d'une bouffe dans un petit restaurant de Udon (nouilles) après avoir scruté la concurrence. Restaurant est un mot un peu fort pour résumer une petite salle climatisé avec environ 15 places assises, une entrée très étroite à la limite de la cachette dans un coin de la gare. Cette porte cachée dissimule bien un endroit où l'on mange, pour l'équivalent de 3€, un bol de nouilles entourés de Japonais qui ont l'air d'avoir vraiment autre chose à faire. On ne commande pas mais on insère ses piècettes dans la machine, qui vous remet un ticket, que vous remettez à la serveuse, qui elle répète inlassablement les mêmes « bienvenue, merci beaucoup, au revoir » comme un androïde, entre-temps elle prend votre commande, l'indique bien fort au cuistot qui vous prépare votre bol devant vous en 30 secondes. Une expérience en somme.

Perdu dans un quartier sale, le côté chaud du Japon, beaucoup de « girls’ bar », beaucoup d’aguicheuses très maquillées et habillées très court. Les Japonais en couple se tiennent très peu souvent par la main pour se balader, ce couple là était uni par une laisse qui partait du cou de la fille jusqu’au poignet du garçon… Étrange délire coquin ou « auto-retenue » en vogue ? Après tout, j’ai vu un couple marcher, la fille tenant le t-shirt de son copain, comme la proie d'un pédophile en prison.

Au bout de quelques tournants aléatoires, une rue commerçante (Hankyu Higashi Nakadori Shotengai) dans laquelle commence la recherche très difficile d’un bar en pleine journée. Assommé par beaucoup de choses, notamment l'abondance des panneaux publicitaires et d'entrées, puisque tout est en hauteur des masses de panneaux colorés se dressent devant vous. Un immeuble qui ne ressemble pas à grand chose, selon l'étage devient un disquaire, un bar, un restaurant, un hôtel ou autre chose.
La Kirin bien fraiche à 5€ finalement trouvée plus dans le désespoir du hasard qu’autre chose ; Dans le bar, quelques salary-men qui fument devant leurs ipad et des japonaises dans la trentaine qui échangent des rires en clopant autour de bières. Un couple assis devant moi, étrange retenue et absence de galanterie évidente, à méditer pour plus tard.

Passé dans un pachinko, bruit assourdissant insupportable. Une rangée de zombies en costumes enchaîne les parties avec nonchalance, un rituel où personne ne semble ni gagner ni perdre.

A la recherche des photos les plus insolites du Japon, une fois sur place on se dit que le travail est trop long et perdu d’avance. J’ai prévu une série de photos sur les images au Japon et plus particulièrement la signalétique, qui est entre le ludique enfantin et l’efficacité d’une société qui prévoit tout, pour tout le monde.
Demain, Kôbe… à suivre.

dimanche 11 septembre 2011

Ouverture (hajimemashite)

Ouverture de ce blog, je sue à grosses gouttes en écrivant ces lignes. Il va faire plus de 30° pendant encore pas mal de temps...

Mon arrivée fut difficile, elle l'est encore puisque je n'ai pas tellement émergé. La famille d'accueil est accueillante et le japonais, une langue peu instinctive pour l'instant.
Drôle sentiment d'éloignement, mais je reste incapable de réaliser que cet endroit sera mon chez-moi pendant 11 mois.

                                                                                  C'est le début de l'aventure.